Soyons éclectiques, attentifs et redécouvrons ces vins nommés « petits » pour nos plus grands plaisirs et surprises. Accordons notre confiance à ceux qui les fabriquent : les vignerons de France. Écoutons les et laissons nous tenter. Ils revendiquent notre confiance, laissons nous donc tenter et repartons avec des idées nouvelles… et des bouteilles pour nos partages de fête et de vie.
A mesure que l’on pratique le vin, on sent se développer en soi une curieuse contradiction : on devient de plus en plus classique (les premiers sont les premiers) et de plus en plus excentrique (on n’hésite pas à accorder à un vin secondaire, mais original, la place qui devrait aller à un grand). Si bien que la cave d’un véritable amateur peut être très grande, et somptueuse, elle ne peut pas être banale. On n’en trouvera pas deux qui se ressemblent.
Cave selon l’âge, la situation, la région …
La cave d’un intellectuel sera différente de celle d’un paysan, celle d’un vieux bourgeois célibataire différente de celle d’un homme d’affaires qui donne trois dîners par semaine. Un médecin de campagne qui mange à la sauvette entre deux consultations n’aura pas les mêmes vins qu’un chanoine de Bordeaux.
On peut aussi avoir des vins de vacances et des vins de travail, des vins pour le Nord et des vins pour le Midi, des vins pour l’été et des vins pour l’hiver, des vins pour les « vins d’honneur » et des vins pour la solitude au coin du feu.
Il y a des caves légères et des caves sérieuses, des caves de la France d’en bas et des caves de la France d’en haut, il peut même y avoir des caves jansénistes, mais que Bacchus nous garde ! souhaitons ne jamais voir ni cave triste ni triste cave.
Derrière les fagots
Mais alors, tout à fait derrière … Vous placerez d’abord les flacons destinés aux amis, ceux qui s’attendent à trouver chez vous « leur » vin. Ils tiendront compagnie aux « vins de naissance », de mariage … achetés à l’occasion de ces évènements et bus à l’occasion d’autres naissances, d’autres mariages. Votre registre des vins fera concurrence à l’état civil.
Et plus encore derrière, derrière les fagots de dentelles, vous rangerez peut-être quelques bouteilles dont seul vous pourrez lire les mystérieuses étiquettes, inconnues sur tous les territoires de France et de Navarre : ce seront les vins de vos amours.
La cave introuvable
Puisque nous parlons de cave triste … La cave introuvable (on la trouve hélas !) hante les nuits des chimériques et des avares. Composée de de Corbières qui enterrent le Chambertin, de vins d’Auvergne qui ridiculisent le Chateaux-Margaux, de mousseux de glaciers dont on ne voit pas la différence avec le Champagne. Léon Daudet cessa de saluer un homme qui préférait le Gaillac au Champagne. Sévère mais juste. Depuis qu’il y a des hommes qui cultivent la vigne et qu’ils boivent, ils ont fini par savoir ce qu’ils font. Pas de cave faite avec des vins qui « valent les grands ».
Cave de vins curieux
Faites avec des vins rares et singuliers, comme les vins de paille (du Jura, des côtes du Rhône, d’Auvergne), des vins de sable (des Landes, de Chalosse), des vins autrefois célèbres (d’Argenteuil, de Saint-Pourçain), des vins dont on parle (le vin de François Mauriac), des vins dont on ne parle plus (il reste une vigne à Auteuil) etc.
Caves artistiques, historiques, militaires …
Pourquoi ne pas reconstituer la cave d’un druide gaulois, d’un légionnaire romain, de Charles Martel qui nous préserva des buveurs d’eau, d’un bourgeois de paris au temps de François Villon, d’un pape au temps d’Avignon, de Talleyrand, de Clemenceau …
Vous pouvez aussi refaire le classement des vins. Militaire, vous aurez des vins d’avant garde, des vins de choc, voire des vins de retraite. Musicien vous aurez des vins pour écouter Mozart, le jazz et la musique sérielle. Peintre, vous les classerez en primitifs, classiques, abstraits. Lecteur, vous aurez un flacon pour lire Ronsard, un autre pour Valéry.